» Notre voix exprimera la sagesse, le réalisme et la dignité de notre peuple, elle ne sera ni au service de l’Ouest ou l’Est, elle sera au service de la justice et de la vérité pour le triomphe de la paix et de l’amitié entre les peuples. »
(Modibo Keita)
Le mouvement des non-alignés
Conscient du fait que les pays nouvellement indépendants dans ces années 60, pouvaient être l’enjeu des disputes entre les grandes puissances, Modibo Keita, en homme de paix, joua un rôle déterminant dans le mouvement des non-alignés.
Pour lui, les pays du tiers monde devaient devenir un groupe de pression au sein de la communauté internationale.
On dit qu’il est l’inventeur de l’expression « non-aligné » : Avant le discours de Modibo Keita à Belgrade, les Etats membres du mouvement étaient appelés : « les pays non-engagés« .
En 1961 à la conférence de Belgrade, aux côtés des présidents Tito, Nasser, Nkrumah et autres dirigeants du mouvement, Modibo Keita déclarait :
« Nous voici donc réunis à Belgrade, à la conférence historique des pays non- alignés et je dois confesser que je préfère l’expression « Non-alignés » à celle de « non-engagés ».
Pour le Mali, le Non-alignement est synonyme de dignité, de personnalité et c’est pour cela, que notre peuple qui n’a jamais rien épargné pour conquérir sa liberté, refuse de se définir en fonction de tel ou tel pays, de tel ou tel Bloc.
J’ai eu l’occasion de le dire partout, cela ne signifie pas que nous nous livrons à un jeu d’équilibre même momentané entre les grandes puissances, car cette pratique-là aboutit nécessairement à la perte de sa dignité, de sa personnalité, à la faillite.
Le Mali n’a rien à voir avec un tel neutralisme qui refuse de s’engager même si l’objectivité, la logique et la morale l’exigent. Mais il est un autre aspect, positif celui-là, qui est le reflet de notre sens des responsabilités sur tous les problèmes, d’avoir notre opinion, de la définir, sans nous inquiéter qu’elle coïncide avec celle de l’Ouest ou de l’Est.
Ce sens de notre responsabilité nous amène à notre opinion entre les forces coloniales et néocoloniales et les peuples subjugués, à une opinion entre les forces impérialistes ou anti-impérialistes »
L’importance de l’apport de Modibo Keita dans la définition de l’action des pays du tiers-monde est indéniable.
A l’issue de la conférence historique de Belgrade, ses paires lui confieront la mission de se rendre aux États unis pour expliquer au Président américain John F. Kennedy la position des non-alignés.
La conception malienne du non-alignement s’accompagna d’une multiplication des échanges entre le Mali et de nombreux pays de l’Est comme de l’Ouest : France, U.R.S.S., Chine, Yougoslavie, Corée, Viêtnam, R.F.A., U.S.A. …
Modibo Keita définissait ainsi la politique de coopération du Mali :
« La République du Mali ne repousse de coopération que celle qui s’appuie sur le paternalisme ou alors celle qui essaie d’intervenir directement dans les affaires intérieures du pays. Le neutralisme est une position délicate et difficile à maintenir : il nous vaut l’objet de pressions constantes… Les pays de l’Est ont été les premiers en des moments difficiles, à nous apporter leur coopération et leur assistance. Nous ne pouvons pas l’oublier ; nous ne voulons pas empêcher d’autres pays non plus de comprendre nos problèmes et essayer d’y apporter des solutions sans exiger de nous des contreparties ».